Commanderie de Prailles
Située sur les bords du Thouet en face du gué de Prailles, la Commanderie de Prailles a été fondée au XIIe siècle, par l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Jérusalem (plus tard Ordre de Malte). Elle est attestée dans une charte de donation avant 1200 et son origine remonte au milieu du XIIème siècle, vers 1150 et peut-être dans les années 1140. Dans un acte très postérieur (1481), la Commanderie de Prailles est dite par le roi lui-même « de fondation royale ». Elle est jointe à celle de Puy de Nayron, (Boussais), déjà en 1331, puis les deux à celle d’Auzon en 1462.
Ces commanderies « jumelles » sont souvent confiées au même commandeur, qui dispose ainsi d’un vaste domaine, mais peuvent encore être données séparément...
De l’époque médiévale datent le vieux corps de bâtiment central (XIIIème siècle ?) avec deux belles fenêtres géminées romanes qui donnent sur le jardin, et bien sûr la chapelle, aux croisées de style angevin.
Sur le tuffeau on perçoit d’infimes traces de peintures dans les tons ocre et rouge. La façade ouest, aujourd’hui éventrée, comportait un portail et un vitrail, connus par des textes postérieurs.
Le règne de Louis XI (1423-1483) marque une époque faste pour la Commanderie de Prailles. Le roi lui-même, qui voyage énormément, la visite au moins 5 fois : peut-être dès 1470 et de 1473 à 1481. Ce sont les dates qui figurent sur 5 lettres écrites de Prailles, l’une précisant Prailles lès le Puy Notre-Dame, localisation qui assurément convient le mieux par rapport à ses itinéraires. Le Commandeur de Prailles, Jehan de Luain(s), est-il proche du roi ? En tout cas, il obtient de lui en mars 1481 le droit de Haute Justice.
Au XVIème siècle, des travaux colossaux transforment la physionomie des bâtiments.
À l’extrémité sud du corps de bâtiment médiéval, on édifie perpendiculairement un grand corps de logis sur trois niveaux. Il est percé de grandes croisées de pierre.
Lors d’une visite d’inspection en 1669, il est dit « commencé et jamais achevé »… Il n’a probablement jamais été vraiment aménagé pour l’habitation des commandeurs. Peut-être en partie pour le fermier.
La chapelle fut également remaniée au XVIème siècle : on voit encore sur le mur sud la piscine à burette ornée d’un entourage gothique tardif où figure le blason du commandeur de Grenouillon (v. 1565-1576). De même, le chevet est alors aplati et percé d’un grand vitrail gothique flamboyant.
À l’époque moderne,les chevaliers doivent servir dans la marine de l’ordre avant de pouvoir devenir commandeur. Quelques-uns ont ensuite fait une carrière soit dans le prieuré d’Aquitaine, soit même dans la direction de l’ordre. Ainsi au XVIIIème siècle, plusieurs parmi les titulaires d’Ozon et Prailles cumulent de nombreuses commanderies et demeurent à Malte. À partir de 1789, il n’y a plus de commandeur. Vendue à la Révolution comme bien national, elle est occupée par des agriculteurs.
Malmenée durant la période post-révolutionnaire et jusqu’à son rachat dans les années 1970, la Commanderie est dans un état préoccupant, et particulièrement sa chapelle (dévers des murs et voûtes qui menacent de s’écrouler, façade éventrée pour faciliter le passage des engins agricoles, etc.).
Une partie des charpentes d’époque et la totalité des toitures sont à restaurer, prenant l’eau, certaines poutres menaçant de rompre à cause de l’humidité de l’ensemble, menuiseries et planchers hors d’usage, pierres et tuffeau fortement dégradés.
Dans cet état proche de la ruine, elle a été acquise par un couple de passionnés dans les années 1970, qui ont assuré son « sauvetage ». Ayant pris leur suite en 2013, nous poursuivons leur œuvre en famille, et nous voulons aujourd’hui entreprendre un grand chantier de restauration de l’ensemble.
La Commanderie de Prailles est aujourd’hui l’un des rares exemples, aussi bien conservés, de ce qu’était une commanderie.
Il est donc d’un grand intérêt patrimonial de préserver ce précieux témoignage de l’Histoire.
Agnès de Blaynat